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David La Chapelle Would be martyr and 72 virgins  2008

Le nu masculin est un des terrains privilégié pour les artistes pour déconstruire le genre masculin et ses attentes. Le nue joue alors avec différents codes pour exposer une image différente de l’homme, en dehors d’un idéal viril ou même d’une certaine faiblesse, c’est tout ce que suppose le masculin qui est remis en question.

Il y a tout d’abord une certain féminisation du sujet mâle, qui interroge les rôles traditionnels.

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Dans The Narcissus of ‘67 : A Mod at the Waterhole of Reddish, de Cecil Beaton, prise en 1968, on voit un jeune homme reprenant le mythe de Narcisse. Mince, maigre, cheveux mi-longs, il n’a pas les attributs typiques de la virilité. Associé à ceci, sa position trahit également une certaine féminité : elle est délicate et pudique. La signification du mythe s’inscrit elle aussi dans cette logique : il est vain et focalisé sur son apparence, ce qui est plutôt un attribut masculin… Cependant, il n’est pas du tout dans un décor naturel, comme dans le mythe originel : le carrelage traduit l’artificialité du personnage. Entouré de fleurs en pots, regardant une sorte de mare aménagée, il est mélancolique. Le titre, Narcissus of ‘67, semble traduire une certaine vision des jeunes hommes de ces années, qui rend la transposition de Narcisse intéressante : lascifs et obsédés par eux-même et par leur apparence (idée qui n’a pas disparue aujourd’hui…), ce qui ne les rends pas vraiment heureux. La modernité, à travers ça, entre autre, a bousculé les rapports de genre. Cette figure de Narcisse a d’ailleurs été reprise dans le très célèbre court-métrage Pink Narcissus de 1971, par James Bidgood, dans lequel un jeune homme prostitué, seul dans son appartement entre les visites de son protecteur, se fantasme au centre de rêves érotique. Le message du Narcisse, dans les deux, est clair : la solitude, l’argent et la sexualité se conjuguent chez les jeunes hommes modernes, devenus quasiment féminins.

 

Dans son Self-Portrait de 2014, Gio Black Peter se met en scène nu, sur un fond blanc. Il porte un voile blanc entouré de fleurs, des colliers, et un bouquet de fleurs. Il regarde sur le côté, hors champs, vers la source de lumière. Fin et lisse, nu, il semble innocent, jeune vierge. Ses accessoires sont très féminins, d’une féminité sainte. Le bouquet et le voile semblent évoquer le mariage… du côté de la mariée. Ce qui est intéressant, c’est le contraste avec la nudité, associée au habits, qui évoque la virginité et la pureté féminine, et les autres oeuvres de l’artiste, plutôt trash. Elle semble évoquer la part de féminité présente en l’homme, qui se traduit par ses attributs féminins, mais sans doute aussi ses jeux sur les codes, tant photographiques que genrés. Par ailleurs, si l’attirail féminin est là, son pénis est visible, ce qui montre également une volonté de ne pas se conformer à ses codes.

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Les attributs féminins sont également présent dans la photographie On the Edge de Robert Mapplethorpe, 1983. On y voit un homme, sur fond noir, courbé. Sur le bas de son dos, un escarpin métallisé ressort particulièrement. L’homme est féminisé par sa posture, courbé comme l’est habituellement un corps de femme. Il dépasse de la photographie. On ne voit pas son sexe. Son corps est entièrement lisse et brillant, rappelant l’escarpin : il en a également la forme. L’homme semble alors soumis à l’attribut féminin : posé sur son dos, l’obligeant à se courber pour garder l’équilibre (équilibre difficile à garder avec des escarpins). Outre la féminisation du corps, il y a ici une soumission au féminin, représenté par l’escarpin.

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On retrouve cette idée dans la photographie de David La Chapelle, Would be martyr and 72 virgins, 2008. Dans cette photographie le modèle, ici aussi lisse et musclé, est attaché à terre par des cordages. Le photographe reprend le mythe islamique du djihad qui promet à ses combattants 72 vierges, en le conjuguant avec celui de Gulliver à Lilliput. Ce sont des poupées voilées de couleurs vives qui l’attachent à terre. Ici l’homme est à la fois poupée lui-même, et soumis aux vierges. On y retrouve le fantasme des vierges qui se transforme en domination par la femme, l’homme se féminisant à leur modèle, en devenant plastique.

La déconstruction du genre par le nu

Cecil Beaton The Narcissus of '67 : A Mod at the Waterhole

of Reddish  1968

Cecil Beaton The Narcissus
Gio Black Peter Self Portrait

Gio Black Peter Self-Portrait  2014

Robert Mapplethorpe On the Edge

Robert Mapplethorpe On the Edge  1983

David La Chapelle Martyr 72 Virgins
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